Action/réaction

Nous avons vu le médecin hier : changement de traitement pour Eric... il va falloir attendre une quinzaine de jours pour commencer à ressentir les bienfaits (ou pas) de la nouvelle molécule.
Je lui ai demandé s'il avait un nom de psychiatre à nous donner pour un suivi plus soutenu ; la réponse est non mais il allait s'informer. Il a contacté un psychiatre devant nous, qui lui a dit qu'il ne suivait pas les personnes aphasiques. On se heurte toujours au même mur mais pour une fois, ce n'est pas moi qui me casse le nez.
 
Eric est sur le fil. Son moral tient à rien... On a beaucoup bougé ces deux jours, je l'ai un peu obligé à me suivre partout ou j'allais, pour qu'il rumine le moins possible. Mais dès qu'il se pose, c'est plus fort que lui, son regard se perd dans le vague, il baisse la tête, prend sa main inerte dans l'autre, et il pense... Ca m'attriste énormément de le voir comme ça...
 
Bien sur, il a un cheminement à faire, bien sur que ça ne se fera pas sans mal, sans temps, sans larmes et sans douleurs... bien sur qu'il doit avancer mais là, il a atteint un nouveau cap, celui de la prise de conscience que le handicap restera, qu'il ne pourra plus jamais exercer son métier, qu'il restera aphasique (même s'il s'améliore encore) et qu'une partie de lui est morte avec l'AVC.
Tout ça, c'est bien clair pour moi, mais pas pour lui. Il bloque là-dessus.Il le sait mais ne l'accepte pas... Est ce possible de l'accepter un jour... Le temps nous le dira. Pour le moment pour lui, c'est inconcevable, et je le comprends...
 
Comment accepter que sa main, son bras, ne fonctionneront plus jamais. Tout est si difficile à faire d'une seule main. Comment accepter de boiter, de marcher avec un appareillage pour le restant de ses jours, d'avoir du mal à franchir des obstacles, de ne plus jamais pouvoir courir, se sentir dans la peau d'un vieillard à même pas 50 ans ? Comment accepter de ne plus pouvoir parler comme on voudrait, alors que les mots sont là, bien clairs dans la tête, mais qu'ils ne peuvent plus franchir le cap de la bouche. Comment vous expliquer sa frustration à ce moment là, ou il tente de dire le mot mais que rien ne sort, qu'un son inintelligible. Parfois, il arrive à dire le bon, ce qu'il facilite grandement notre quotidien.
 
Un handicap, quel qu'il soit, c'est un manque, un malaise, un mal être, une différence, une cicatrice à vif, une douleur physique et morale, à vie.
Eric est devenu handicapé brutalement. Et il faut qu'il apprenne à l'accepter et à vivre avec.... doucement....
 
Dans combien de temps ira t'il mieux ? Dans combien de temps souffrira t'il un peu moins ?
J'aimerais qu'il arrive à être à nouveau heureux... au moins un peu... un jour...
 
 
 

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